mardi 26 avril 2011

La Syrie des AL-ASSAD

Rien ou presque ne prédestinait Bachar AL-ASSAD (fils cadet de Hafedh AL-ASSAD) à "hériter du trône de son père" au décès de ce dernier (qui accéda au pouvoir à la suite d'un coup d'État en 1970 et y demeura jusqu'à sa mort en 2000). Hafedh AL-ASSAD avait commencé à former son fils aîné Bassel pour la succession. C'est dire à quel point la démocratie était (et le demeure encore de nos jours) ancrée dans ce pays qui est la Syrie. Seulement la mort en avait décidé autrement, le jour où elle ravit le concerné dans un accident de voiture en 1994. Du coup le cadet ophtalmologiste de formation maîtrisant bien l'anglais et le français est contraint de rentrer de Londres et d'intégrer l'académie militaire où il obtient le grade de colonel en 1999. À la mort de son père le parlement syrien amende la constitution pour abaisser l'âge minimum du candidat à la présidentielle, qui passe ainsi de 40 à 34 ans et il est promu deux jours plus tard général en chef des forces armées syriennes. Le 25 juin 2000, il est proposé comme président par le parlement syrien et sera élu le 10 juillet 2000 par un référendum. Il fera quelques concessions, mais la vieille garde du régime et du parti Baath (Résurrection) –les radicaux de l'administration de son père- l'obligèrent à maintenir l'état d'urgence décrété en 1963 et à mettre fin à ce mouvement libéral fort timide du reste. La monarchie AL-ASSAD est née mais ce sont les radicaux qui tiennent les rênes du pouvoir et ce jeune président n'a qu'à obtempérer.
Il jouera, ainsi, à l'équilibriste sur plusieurs fronts : avec Israël, avec le Liban, avec l'Iran, avec l'Irak, avec les États-Unis, etc … Pas aussi rusé que son père, mais autant opportuniste pour manipuler en sa faveur les situations et les tensions auxquelles il se trouve confronté. Il est réélu en 2007 avec 97,62%. Un score très largement répandu dans les pays à parti unique ou à régime répressif. Score que même les Élus de Dieu, s'Ils retournent sur terre ne pourront égaler ; et qui a toujours souligné l'absence de démocratie réelle dans les pays qui l'affichent. Il est tour à tour banni par la communauté internationale (à la suite de l'assassinat du premier ministre libanais Rafik HARIRI en février 2005) ou "chouchouté" en tant que partisan du projet de Nicolas SARKOZY pour instituer une Union pour la Méditerranée. Ce qui lui vaut même la tribune d'honneur aux côtés des autres chefs d'États signataires de l'accord lors du défilé militaire du 14 juillet. Sa présence à la tribune officielle, en ce jour symbolisant les droits de l'homme dans le pays des droits de l'homme, fut l'objet d'une vive controverse.
Depuis la mi-mars 2011 la Syrie vit à son tour les bouleversements du printemps arabe et les quelques concessions accordées jusqu'à présent par AL-ASSAD (y compris la levée de l'état d'urgence : le 21/04/2011) ne sauront calmer le peuple qui exige de plus en plus haut et fort son départ. Son pouvoir essaye de mater dans le sang ce mouvement contestataire et la Syrie n'arrête pas de compter par centaines ses morts et les arrestations arbitraires. L'occident ne semble pas, du moins pour l'instant encore, vouloir prendre la même initiative que pour la Libye. L'amitié entre les deux présidents syrien et français ne doit pas être étrangère à cela au grand dam du principe des droits de l'homme. La Syrie n'a, certes, pas le pétrole de la Libye mais dispose d'appuis dans la région (l'Iran et ses ramifications dans la région avec un Hezbollah très actif).
La rue finira par avoir raison de lui et de son régime, comme elle l'a si bien fait en Tunisie et avec moins de réussite en Égypte. Ce jour-là, il comprendra que l'on ne s'improvise pas dictateur. Son père avait eu tout le temps pour mettre les choses en place, acquérir le pouvoir et le consolider, alors que lui, il appartient à cette génération de jeunes héritiers, tels Abdallah II en Jordanie ou Mohamed VI au Maroc qui ont vu le pouvoir leur échoir sans qu'ils  aient eu le temps de se forger le caractère pour assumer pleinement une telle charge. À sa décharge, comme mentionné ci-dessus, il se destinait à la médecine et il se retrouve (sans pouvoir refuser vu le caractère de son père) à gérer les affaires d'un état autoritaire où l'ancienne équipe de son père gère de facto et l'oblige à entériner ses choix. Il n'a pas eu le temps de bien assimiler tous les rouages d'une telle responsabilité dans un monde qui bouge beaucoup plus vite que du temps de son père. Mais cela ne lui pardonne en rien ce qu'il fait subir à son peuple.
La seule issue pour AL-ASSAD serait de démanteler l'appareil de la répression, en opposant un État de droit à la corruption ou en laissant de nouveaux partis affronter le parti Baath. Mais en agissant ainsi, il supprimerait les bases de son pouvoir sans garantie pour sa survie politique. C'est pourtant la seule option, risquée certes, qui lui vaudrait sans doute un retour de popularité. Mais pour cela, il lui faudrait affaiblir son propre entourage et renoncer au modèle d'autorité qui prévaut depuis le coup d'État qui porta son père Hafez AL-ASSAD au pouvoir en 1970.
En est-il capable ? Rien ne l'indique pour le moment. Mais quand on voit qu'à l'intransigeant président Yéménite d'il y a quelques jours s'est substitué un autre qui réclame l'immunité pour quitter le pouvoir, nous ne nous étonnons de rien pourvu qu'il soit dans l'intérêt véritable de ces peuples.

Lotfi AGOUN

dimanche 17 avril 2011

Le Yémen : un pays pauvre très convoité

Le Yémen est un pays situé à la pointe sud-ouest de la péninsule Arabique ; il est composé de plusieurs tribus et possède des façades maritimes sur le golfe d’Aden et sur la mer Rouge. Il a des frontières communes avec l’Arabie Saoudite au nord et le Sultanat d’Oman à l’est. Le Yémen couvre une superficie totale de 527.970 km² (presque autant que la France : 547.030 km²). Plusieurs îles font partie du territoire yéménite : l'île Kamaran en mer Rouge, l'îlot de Périm qui commande l'accès à la mer Rouge par le détroit de Bab el-Mandeb, et l'île Socotra (la plus grande des îles) dans l'océan Indien. La capitale du Yémen réunifié est Sanaa. Sa population s'élève à 24 millions d'habitants (sans groupe majoritaire). Au Yémen, la religion est toute-puissante : c'est un État islamique régi par la Charia. D'ailleurs, l'article premier de la Constitution yéménite proclame que "la République du Yémen est un État arabe, islamique, indépendant, souverain, un et indivisible".
C'est le pays le plus pauvre du monde arabe tout en étant une pièce maîtresse sur l’échiquier de la stratégie géopolitique mondiale. Il n’a pas beaucoup de pétrole et ses réserves de gaz naturel s’amenuisent, tout comme l’eau dans le nord du pays. De nombreuses régions n’ont pas accès à l’électricité. C’est un pays sous-développé, avec des taux d’alphabétisation très faibles et un chômage record qui avoisine les 35 % et touche la moitié des jeunes.
Le Yémen actuel est né le 22 mai 1990 de la fusion de la République Démocratique et Populaire du Yémen (ou le Yémen du Sud) seule République marxiste du monde arabe. Son président était Ali Salim al-Beidh et sa capitale Aden), et la République Arabe du Yémen (ou le Yémen du Nord, d'idéologie pro-occidentale. Son président était Ali Abdullah Saleh et sa capitale Sanaa). Cette réunification marque la fin de la guerre froide dans le monde arabe alors qu'en Europe se déroulait progressivement la chute du bloc de l'Est. Le premier sera désigné premier ministre et le second président.
Contrairement à l'Allemagne de l'Est, à l'Allemagne de l'Ouest et aux deux Corées (Corée du Nord et Corée du Sud), les relations entre les deux Yémen étaient plutôt amicales, bien qu'elles fussent parfois tendues. Alors que le Yémen du Nord avait accédé à l’indépendance après la chute de l'Empire Ottoman en 1918, le Yémen du Sud devint une colonie britannique. Il parvint à son indépendance en 1967 à la suite du retrait des troupes britanniques.
Le Président Ali Abdullah Saleh est né le 21 mars 1946 (comme l'atteste le site de la présidence yéménite) au village Al-Ahmar (Sanaa – Yémen du Nord). Il rejoint les forces armées en 1958 (soit à l'âge de 12 ans) et intègre l'académie militaire deux ans plus tard (À 14 ans. Sic !). Il est nommé président de la République Arabe du Yémen (Yémen du Nord) lors de l'assassinat du président Ahmad al-Ghashmi le 24 juin 1978 (à l'âge de 32 ans). Sa présidence de 1978 à 1990 est fortement marquée par la Guerre froide et la lutte idéologique qui opposait le Yémen du Nord (unionistes) au Yémen du Sud (marxistes).
Il a soutenu l'Irak de Saddam Hussein au moment de la guerre du Golfe (tout en restant en bons termes avec Washington : C'est dire le poids stratégique de ce pays pauvre), sans pour autant soutenir l'annexion du Koweït par l'Irak. Il fut partie prenante de la guerre civile au Yémen de 1994 faisant de 7.000 à 8.000 victimes lorsque les autorités du Sud, dirigées par Ali Salim al-Beidh, tentèrent de faire sécession, en vain.
Il est le premier président élu du pays en 1999 avec 96 % des voix et est réélu le 22 septembre 2006 avec 77,2% des suffrages. En 2000, il régla le long contentieux frontalier avec l'Arabie Saoudite. En 2004, il ordonna une campagne militaire contre l'insurrection au Saada (au nord du pays ; soutenue par l'Iran). Cette campagne dura jusqu'à début 2010 et provoqua la mort d'environ de 5.000 à 7.000 Yéménites.
Malgré les efforts d'Ali Abdullah Saleh pour une pseudo-démocratisation du pays et dans la lutte contre l'islamisme, le Yémen reste un foyer d'instabilité, qui doit faire face de plus à une insurrection dans le sud du pays appelant au retour d'un État indépendant au sud correspondant au territoire de l'ancienne République démocratique populaire du Yémen.
Les revendications des manifestants du 03 février 2011 à Sanaa n'étaient que marginalement sociales et économiques. Il n'était pas question de lutte contre le chômage, de demande de meilleurs services ou de protestation contre la hausse des prix par exemple. Elles réclamaient la réforme du système politique, la lutte contre la corruption et le gel des projets de réforme annoncés par le parti au pouvoir. Les critiques visant le président Saleh sont relativement minoritaires, et les partis qui ont encadré ces protestations n'appellent pas à son renversement, mais au transfert pacifique du pouvoir lors d'élections libres. Ces manifestations sont à distinguer des immolations ou des mouvements dans les gouvernorats du sud notamment, qui se basent sur des revendications économiques et sociales (marginalisation générale, chômage, retraites gelées, hausse du coût de la vie, etc.). Les mouvements dans le sud du pays ont progressivement pris une dimension plus strictement "politique" avec le développement des sentiments régionalistes et sécessionnistes.
 À la suite des différentes manifestations qui touchent le pays à partir du 27 janvier 2011, le président Saleh fait plusieurs annonces successives :
  • le 02 février 2011, il renonce à se présenter pour un nouveau mandat présidentiel en 2013,
  • le 10 mars 2011, il annonce une nouvelle Constitution et des élections pour le début de l'année 2012,
  • le 20 mars 2011, il limoge son gouvernement,
  • le 23 mars 2011, il propose un référendum constitutionnel, des élections législatives et présidentielles avant la fin de l'année 2011.
Mais il continue à s'accrocher de toutes ses forces au pouvoir qu'il incarne depuis presque 33 ans. Un pouvoir qu'il a essayé de consolider en confiant la gestion des postes sensibles à certains membres de sa famille, ses proches et de ses inconditionnels. Il a affirmé, à plusieurs reprises, qu'il ne cèderait pas aux appels de l'opposition et des manifestants lui demandant de quitter le pouvoir, assurant qu'il ne le remettrait que par les urnes.
Après la chute des présidents de la Tunisie et de l’Égypte, Ben Ali et Moubarak, est-ce au tour du président du Yémen, Ali Abdallah Saleh, d’être évincé par une révolte populaire ? Son régime était un allié indispensable de l’Occident dans la lutte contre le terrorisme en général et contre Al-Qaïda en particulier. Si le pays doit basculer dans la guerre civile, comme le prédit le président Saleh, l’inquiétude sera vive à Washington et dans d’autres capitales occidentales. Pourtant, après trente-trois ans au pouvoir, il est temps que le président Saleh cède la place.
Pauvreté, forte tradition tribale et incurie du gouvernement central ont toujours constitué les ingrédients de la vie politique au Yémen, qui, en outre, a servi de base à Al-Qaïda pour plusieurs attentats visant les États-Unis et l’Arabie Saoudite.
Le président Saleh tente depuis toujours de gouverner le pays en ménageant les rivalités tribales au détriment du développement du pays et de l’unité nationale et il compte bien s’accrocher au pouvoir jusqu’aux élections qu'il propose pour la fin de l'année 2011 (voire jusqu'aux élections de 2013).
Il est vrai que les tensions politiques liées à l’avenir du pays ne vont pas s’apaiser, du jour au lendemain, avec le départ du président. Mais le risque est encore plus grand s'il continue à s’accrocher au pouvoir avec pour corolaire l'éclatement d'une guerre civile. Le pays basculera, alors, dans le chaos et le Yémen deviendra un état en déshérence. Al-Qaïda (comme beaucoup d'autres noyaux subversifs) a prospéré en réaction à un régime autoritaire soutenu par les Américains. Dans ce pays, comme dans d’autres pays du monde arabe, la démocratie est la meilleure arme contre Al-Qaïda et l'extrémisme.

Lotfi AGOUN

dimanche 10 avril 2011

Les Occidentaux et Le Bahreïn

Ayant bien connu l'Arabie Saoudite, le Kuwait, le Qatar et Bahreïn pour y avoir vécu, je peux affirmer que ce dernier se distingue de manière particulière dans cette région du monde. Ce petit royaume (750 kilomètres carrés) est un archipel de 33 îles dont certaines sont inhabitées. Il compte un peu plus de 1,25 million d'habitants (55 % sont chiites) dont près de la moitié sont des nationaux (70 % sont chiites).
Les autochtones sont à 95% de confession musulmane (Les Bahreïnis se sont convertis à l'Islam en l'an 7 de l'Hégire). Les sunnites minoritaires (mais plus homogènes) détiennent le pouvoir et se prévalent d'une légitimité historique qui remonte à 1783 : date à laquelle les AL-KHALIFA unifièrent le Bahreïn et le gouvernèrent jusqu'à ce jour. Les chiites sont divisés en deux clans  : les chiites d'origine arabe (Baharna) qui revendiquent le fait d'être des Bahreïnis de souche et ceux de souche persane (Ajam) qui auraient été déplacés du sud de l'Iran vers Bahreïn par les Anglais pour servir de main-d'œuvre afin d'extraire le pétrole découvert en 1932. Le Bahreïn a été sous protectorat anglais de 1861 à 1971.
Ce petit royaume occupe une position très stratégique entre l'Iran et l'Arabie Saoudite à laquelle il est relié par un pont-digue (la chaussée du Roi Fahd) long de 25 km.
Le roi Hamad a essayé depuis son intronisation à la suite du décès de son père Cheikh Issa Ibn Salman AL-KHALIFA d’asseoir davantage l'esprit d'ouverture qui distingue son royaume dans la région.
Le multi confessionnalisme est une réalité de la vie de tous les jours : églises, synagogues et temples y sont autorisés au même titre que les mosquées. Les résidents ont le droit de consommer ce que leur culture ou religion autorise.
Les femmes y jouissent de la liberté vestimentaire, du droit au travail et de la conduite des véhicules. Elles ont même obtenu, depuis 2001, le droit au vote. Aujourd'hui nous y en rencontrons la ministre, la députée, la conseillère municipale et même 10 femmes au Conseil Consultatif (Choura) qui compte 40 membres dont 3 sont de confession juive. L'ambassadeur de Bahreïn aux États-Unis est une Bahreïnie juive … Un cas unique dans le monde arabe.
Le multipartisme est une évidence de la vie courante avec pas moins de sept partis légaux (d'autres ne le sont pas, mais demeurent actifs). L'opposition est présente au Parlement. La liberté de la presse est reconnue, effective et même très active.
Le Bahreïn est le premier pays au monde à s'être soumis, en avril 2008, à l'examen périodique universel du Conseil des Droits de l'Homme. Et la publication de ces rapports s'effectue sans la moindre censure.
Au même titre que le Hezbollah chiite au Liban, l'opposition chiite à Bahreïn est courtisée par l'Iran. Cela amplifie d'autant l'importance de ce petit royaume, clé de stabilité de l'Arabie Saoudite dont les régions orientales sont majoritairement peuplées de chiites.
Manama, la capitale de Bahreïn, abrite le Quartier Général de la Vème flotte américaine qui est à moins d'une heure de vol d'Abou Dhabi, la nouvelle implantation militaire française dans le Golfe Arabe ou Persique selon les appellations des uns et des autres.
Les visées de l'Iran sur ce "site" stratégique, à plus d'un titre, remontent au départ des Anglais. Déjà à cette époque, il avait fait part aux Nations-Unies de ses prétentions sur l'archipel. Si l'Iran arrive à mettre la main, d'une manière ou d'une autre, sur Le Bahreïn, la stabilité de toute cette zone sera menacée, car c’est le cœur de la richesse pétrolière saoudienne ainsi que le point d’approvisionnement pétrolier de l'Occident et d'une bonne partie du reste du monde. Avec des conséquences immédiates sur la présence de la Vème flotte américaine et celle des forces françaises dans la région.
Quand on parle du Bahreïn et de ce qui s'y passe de nos jours, il est totalement erroné de le comparer à ce qui s'est passé en Tunisie, en Égypte ou au Yémen. Les données économiques de ce royaume sont sans aucune commune comparaison avec celles des pays cités. Le PIB est de l'ordre 19,5 Mds USD et le PIB par habitant est de l'ordre de 18.000 USD. Le taux d'alphabétisation est de 91,5 % (H) et 84,2 % (F) et l'espérance de vie est de l'ordre de 75,6 ans. [Les données mentionnées dans cet article sont de 2009].
La frange radicale de l'opposition (très liée à l'Iran) a jugé opportun de profiter du printemps arabe pour pousser les Bahreïnis à manifester et la tension est allée crescendo jusqu'à réclamer l'instauration d'une république islamique (à l'Iranienne). L'Occident qui s'est trouvé à la fois pris de court par le mouvement populaire tunisien et lâche par son silence au début de celui du peuple égyptien, a pressé le roi Hamad de faire des gestes d'apaisement afin de calmer la rue. Or les revendications réelles ne sont pas les mêmes que celles des Tunisiens et des Égyptiens. Le roi a fait ce qui devrait calmer les esprits allant jusqu'à accorder des amnisties à ceux qui sont en exil. Mais rien n'y fait. Et Le Bahreïn a commencé à compter ses morts à la suite de ces troubles.
Les Occidentaux vont encore une fois "lâcher" leurs amis en poussant le paroxysme, cette fois, jusqu'à laisser l'Arabie Saoudite et Les Émirats Arabes Unis intervenir dans le cadre de l'accord d'entraide du "G.C.C" (Gulf Cooperation Council). L'assistance agissante (envoi des forces de l'ordre le 14 mars 2011) de ces deux pays a permis au gouvernement bahreïni de reprendre la main. Et ces mêmes Occidentaux ont, par la suite et encore une fois, au nom des droits de l'homme (à géométrie variable selon leurs intérêts du moment) dont ils se proclament, condamné l'intervention.
Ainsi dans cette bataille larvée pour leadership dans le Golfe Arabe ou Persique, la monarchie sunnite saoudienne a marqué un point sur la théocratie chiite iranienne. Mais les monarchies de la région commencent à se poser sérieusement les questions suivantes :  

  • Est-ce que les Occidentaux sont vraiment nos amis et jusqu'à quel point pourrons-nous compter sur eux ?
  • Comment contrecarrer les visées de l'Iran sur notre région et préserver nos intérêts si nous ne pouvons plus compter sur nos pseudo-amis ?
Les Occidentaux sont invités à bien se concerter avec les concernés de tout bord afin que la stabilité de cette zone et par extension d'une grande partie du globe soit préservée. Il est primordial qu'ils admettent finalement que leurs intérêts ne peuvent demeurer éternellement au-dessus de ceux des autres ou à leur détriment.

Lotfi AGOUN

dimanche 3 avril 2011

Petits arrangements entre «amis»

Ce que le génie n'est pas parvenu à faire pour Nicolas SARKOZY, le jour où ce dernier est tombé sur la fameuse lampe magique ; à savoir lui permettre de retrouver sa virginité politique auprès des Français ; le président français actuel est en train de le réussir, avec l'aide de certains autres "démocrates occidentaux", en réhabilitant certains proches (voire très proches même) et presque aussi terroristes et tortionnaires que KADHAFI lui-même.
Les politiques occidentaux nous ont habitués à les voir dérouler le tapis rouge devant leur hôte de marque et tout le faste qui va avec, acceptant même certaines extravagances, comme dresser une tente dans le cœur de Paris.

Reconnaître le Conseil National Libyen "C.N.T" est une chose, mais accorder une nouvelle virginité politique à des hommes au passé sulfureux et fidèles de KADHAFI jusqu'à une date récente : voilà ce que le génie n’a pas réussi, mais notre SARKOZY et ces politiques, si.

Je les cite et la liste n'est pas exhaustive :

Moustapha ABDELJALIL : Le président de ce conseil n'est autre que l'ex-ministre de la Justice libyenne. C'était le président de la cour d'appel de Tripoli qui, à deux reprises, avait confirmé la peine de mort des infirmières bulgares. Un fidèle parmi les fidèles qui, en récompense de son intransigeance dans ce procès, fut nommé ministre de la Justice en 2007.

Idris LAGA : le coordinateur militaire du C.N.T n'est autre que l'ex- président de l'Association des parents d'enfants infectés, très active pendant toute l'affaire des infirmières bulgares. Très proche de KADHAFI, il avait fait monter les surenchères en instrumentalisant la douleur des victimes.

Moussa KOUSSA : le tout récent ex-ministre des Affaires étrangères de KADHAFI. Il ne va pas tarder à rejoindre la rébellion alors même qu’il a été expulsé en 1980 de Londres (là où sa carrière sur la scène internationale a commencé quelque 30 ans plus tôt comme ambassadeur), sur ordre du gouvernement britannique parce qu'il ne cachait pas ses intentions de régler leur compte à deux opposants au régime du colonel KADHAFI.

Le général Abdel-Fattah YOUNIS est devenu la coqueluche des Occidentaux - le Quai d'Orsay relate sur son site une conversation téléphonique entre lui et Alain JUPPÉ le 5 mars 2011 - qui espèrent que son ralliement permettra aux insurgés de reprendre du poil de la bête sur le terrain militaire. Ils oublient ce que ses hommes, sur ses ordres, avaient infligé comme mauvais traitements aux infirmières - viols, électrochocs et morsures de chiens notamment – pour leur faire avouer des crimes qu'elles affirmaient n'avoir jamais commis.

Et la liste ne s'arrête pas là. Ces opportunistes, ayant vu ce que la rue à pu faire en Tunisie et en Égypte ont été prompts à retourner leur veste (avec la bénédiction de ces "démocrates occidentaux"). Le peuple tunisien a exigé et obtenu que tous les collaborateurs de l'ancien régime soient écartés de la sphère des politiques qui dirigeront désormais la nouvelle République. Le peuple égyptien a émis les mêmes revendications et a pu en obtenir certaines.

Les suscités qualifiés de paria hier par ceux-là mêmes qui les serrent dans leurs bras aujourd'hui, vont se retrouver aux commandes de ce pays : La Libye. On se demande bien dans l'intérêt de qui ? Du peuple libyen ? Leur propre intérêt ?... Ou bien celui de ceux qui leur accordent cette nouvelle virginité ?...

Certains des démocrates occidentaux n'hésitent pas à affirmer qu'ils préfèrent à la limite un régime islamiste extrémiste/radical en Libye à celui de KADHAFI.
Nick CLEGG, le chef du parti Libéral Démocrate britannique, occupe la fonction de vice premier ministre au service de Sa Majesté la reine Élizabeth II. Il est donc ce qu’on appelle "une grosse pointure" de la coalition au pouvoir à Londres.
Il vient de dire à l’occasion d’un discours prononcé à Mexico (29 mars 2011) où il se trouve en visite officielle, que le résultat de l’agression militaire contre la Libye à laquelle participe son gouvernement pourrait bien se terminer par l’instauration de ce qu’il appelle un régime islamiste radical en cas d’éviction du colonel KADHAFI. Il laisse, par ailleurs, sous-entendre qu'il préfèrerait un régime comme celui que les Américains ont mis en place en Irak.
Nick Clegg dit également dans son discours : «Ce n’est pas à nous de choisir le gouvernement libyen ni même le système de gouvernement en Libye» mais il continue à penser quand même qu’il revient à la Grande-Bretagne et à ses alliés de sommer KADHAFI de quitter le pouvoir dans son pays.
D'où la perpétuelle question : Dans l'intérêt de qui ?

Lotfi AGOUN