dimanche 1 mai 2011

Similitudes et différences entre la Libye et la Syrie


Un peu plus d'un an sépare les deux prises de pouvoir par la force en Libye (le 1er septembre 1969) et en Syrie (le 13 novembre 1970).
Aussi bien AL-ASSAD (père et de nos jours fils) que KADHAFI vont veiller à ce que toute opposition à leur perception de la conduite des affaires de l'État soit réduite à néant.
Tous les deux cosignaient avec l'Égypte de SADATE, en mars 1972 la création de l'Union des Républiques Arabes, regroupant ces trois pays. Cette union restera fictive jusqu'à sa dissolution en mars 1977. Il y a eu une seconde tentative entre ces deux pays en 1980 qui est restée sans lendemain.
Ces deux chefs d'État vont confier la gestion des affaires de l'État à leurs proches et permettre clientélisme, corruption, répression et torture. Mais tant que les intérêts des Occidentaux étaient préservés, personne ne bronchait.
Tous les deux vont manifester une grande hostilité essentiellement envers les États-Unis et Israël ce qui leur vaudra l'admiration de leur peuple et celle des peuples arabes et musulmans des autres pays.
Ces deux pays ont été taxés par une bonne partie de la communauté internationale de pays exerçant le terrorisme international et ayant une grande propension à s'ingérer dans les affaires d'autres pays. Ils ont été souvent qualifiés d'États "voyous".
La communauté tiendra la Libye pour responsable l’explosion en plein vol d’un avion de ligne américain au-dessus de la ville écossaise de Lockerbie (1988). Et la Syrie pour l'instigateur de l'assassinat du premier ministre libanais Rafik HARIRI (2005).
Ils seront mis au ban de la communauté internationale et puis réhabilités selon la conjoncture du moment ; selon les intérêts et la stratégie géopolitique de l'Occident dans ces parties du monde arabe.
Ils seront même reçus et dorlotés par les Occidentaux et notamment par Nicolas SARKOZY.
AL-ASSAD fils vient de rééditer le méfait de son père (1982) qui avait fait ouvrir le feu sur son peuple et bombarder la ville de Hama. Il a ainsi donné l'ordre à son armée de tirer sur le peuple syrien.
KADHAFI l'avait précédé quelques semaines plus tôt.
Les similitudes, du moins les plus saillantes, s'arrêtent à ce niveau.
Voyons à présent les différences : la plus notoire de nos jours est la position de l'Occident devant le même acte barbare qu'est celui de faire ouvrir le feu sur son propre peuple. L'Occident n'a pas mis longtemps pour réagir à propos de ce qui se passe en Libye et de bombarder certains sites libyens. Concernant la Syrie, il vient à peine d'élever la voix et de formuler certaines menaces qui resteront sans suite.
Pourquoi ?
Tout simplement parce que :
1/ La Libye a le pétrole et le gaz naturel et des réserves financières substantielles. Et c'est ce qui intéresse la coalition et non l'intérêt du peuple libyen. Les pays qui la composent aujourd'hui se disputeront demain le partage des richesses et ressources libyennes. Ne nous laissons pas berner par les sentiments altruistes qui semblent animés ceux qui hier donnaient l'accolade à KADHAFI.
2/ La Syrie dépourvue de ressources naturelles pouvant intéresser les Occidentaux n'en demeure pas moins stratégique de par la position qu'elle occupe dans la région, de par ses alliés (l'Iran, la Turquie, le Liban, Hezbollah, Hamas à Gaza) et de par sa zone d'influence englobant même l'Arabie Saoudite (qui ne veut laisser l'Iran mettre la main complètement sur la Syrie). Ceci étant, Israël s'accommode bien de son voisin tant que son activisme à son égard ne va pas au-delà des rodomontades de principe.
3/ La Libye est constituée de tribus ; la Syrie (à majorité sunnite) de clans.
4/ En outre, la coalition qui avait débuté l'opération en Libye avant de passer le relais à l'OTAN ne pourra refaire la même chose en Syrie. Pour deux raisons au moins : éviter que les peuples arabes ne pensent que ce sont les croisades du XXIème siècle et puis ces pays sont déjà englués en Afghanistan et ne semblent prêts de pouvoir s'en sortir de sitôt.
5/ Les Occidentaux se sont toujours accommodés de dictateurs à la tête de certains pays du moment que leurs intérêts propres étaient bien maintenus. Ce n'est donc pas la situation politique et sociale du pays qui les pousse à agir loin de là. Ils préfèrent un régime autoritaire qui leur convient plutôt qu'une démocratie avec des lendemains incertains pour eux et pour ce qu'ils essayent de préserver.
Ainsi, devant le même fait inacceptable (de l'aveu même d'OBAMA et de SARKOZY), l'Occident fait bombarder les bureaux de KADHAFI à Tripoli (Seif Al-Arab, le plus jeune des six fils du dirigeant libyen n'occupant pas de poste officiel connu et 3 de ses petits fils ont été, d'après le porte-parole du gouvernement libyen, Moussa IBRAHIM, tués lors des bombardements de l'OTAN de la nuit du samedi 30/04/2011) et se contente de formuler quelques protestations, sans réelle portée, contre Damas.
Bien sûr, les pertes humaines dans l'entourage de KADHAFI ne sont pas plus atroces que celles engendrées par ses sbires ou celles des civils innocents tués lors des raids de l'OTAN ; mais la question qui s'impose est de comprendre comment peut-on tenir deux langages différents (deux attitudes différentes) pour un fait similaire ?
Une seule réponse me vient à l'esprit : Deux poids, deux mesures.

Lotfi AGOUN

3 commentaires:

  1. Article intéressant qui traduit bien la réalité des choses.

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  2. Merci Lotfi, le parallèle entre ces deux pays ne manque pas de nous interroger: pourquoi nos chefs d'états ont-ils décidé de corriger le chef Lybien, mais pas le représentant de la Syrie ? Certains disent que notre armée ne peut se battre partout, mais la vérité est plutôt dans cet article. Deux poids, deux mesures...
    J'ai mis ce texte très instructif dans mon blog, amitié.

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  3. Tout simplement parce qu'aucune action militaire ne serait envisageable en Syrie sans une déstabilisation de l'ensemble de la région et qu'au conseil de sécurité aussi bien la Russie que la Chine y mettrait leur véto.

    KADHAFI à la différence de AL-ASSAD est honi par l'ensemble des dirigeants des autres pays arabes. Le colonel KADHAFI n'a jamais été autre chose qu'un facteur de tension entre les arabes.

    La Syrie quoiqu'on pense de ses dirigeants qui sont de vrais boucher a joué un rôle politique( par opposition aux marottes du Néron Lybien frappé de la folie des grandeurs) et a su développer des alliances régionales aussi bien avec la Turquie qu'avec l'Iran.

    Les occidentaux ne verseraient pas une larme si AL-ASSAD était renversé mais ils n'interviendront pas et les Syrien sont réellement seuls face à la répression.

    Il n'est pas dit que le peuple ne finira pas par en triompher mais personne ne les protégera du carnage sauf soulèvement d'une partie de l'armée finalement écœurée du rôle qu'on lui fait jouer.

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